Bonjour et bonne année,
La menace va même plus loin avec l'UGC Normandie en très large perte de vitesse et avec un loyer très élevé. UGC ne le considère plus comme sa vitrine (diminution des AP, frais réduits au minimum).
Le Balzac semble aussi poser un problème, mais son équipe est très attachée à la salle et a une toute autre politique d'animation. Maintenant les charges restent les charges ...
Comme la consultation de l'archive n'est que temporaire, en voici le texte:
"Le maire du 8e arrondissement de Paris, François Lebel (UMP), est catégorique : "L'avenue des Champs-Elysées est sur le fil. Elle n'est plus exceptionnelle, pas encore banale." Les élus parisiens redoutent que l'artère la plus fréquentée de France - entre 80 et 120 millions de visiteurs par an - ne devienne un "gigantesque centre commercial" et perde de son prestige.
Aujourd'hui, les élus, de manière générale, ont peu de moyens pour contrôler l'implantation des commerces. Ils peuvent, comme ils l'ont fait pour le Fouquet's, recourir au classement comme "lieu de mémoire". "On ne peut pas classer toute l'avenue", remarque Renaud Dutreil, ministre du commerce.
En vertu de la loi du 2 août 2005 en faveur des PME, "les municipalités pourront préempter les fonds de commerce dans les zones d'exception touristiques", ajoute le ministre. M. Dutreil annonce au Monde que le décret d'application doit paraître début janvier 2007. "L'interventionnisme public est légitime pour préserver les Champs-Elysées", insiste le ministre du commerce.
Depuis dix ans, la pression immobilière sélectionne les commerces les plus rentables - les grandes marques de vêtements - seuls capables de payer un loyer qui frise les 10 000 euros le m2 par an pour les meilleurs emplacements. Même de grands groupes ne peuvent plus suivre.
Le cinéma historique UGC Triomphe - quatre salles, 750 fauteuils, 260 000 entrées par an - va partir des Champs-Elysées. Plus précisément, le Triomphe se dit "chassé" de la célèbre avenue, et Hugues Borgia, directeur général d'UGC Ciné-Cité, invoque "les conditions du renouvellement du bail pour 2007" qui "ne nous permettent pas de rester".
Le loyer annuel proposé par le propriétaire des murs, la Société foncière lyonnaise (SFL), aurait été proche de son chiffre d'affaires. Intenable ! "Nous ne chassons pas UGC. Des discussions sont en cours, rétorque François Sebillotte, secrétaire général de la SFL. Notre métier est de rechercher le loyer optimal pour nos immeubles, en fonction du marché que nous ne maîtrisons pas."
Pour l'emblématique cinéma UGC Normandie - qui partage une entrée avec le Lido -, la question de fermer se posera "à terme". Avec un chiffre d'affaires de 4 millions d'euros, une fois les distributeurs payés (la moitié), il faut honorer le loyer "proche des 2 millions d'euros. C'est quasiment notre marge brute, avant même d'avoir versé les salaires, précise M. Borgia. Nous perdons de l'argent sur cet établissement".
Malgré sa programmation inventive, le Balzac - un des trois cinémas indépendants du quartier - tient difficilement le coup en versant un loyer annuel de 160 000 euros, soit 16 % de ses recettes. Quinze fois plus qu'en 1973. "Notre survie est un enjeu de société, insiste Jean-Jacques Schpoliansky, le directeur. Nous contribuons à animer le quartier."
Pour la Ville de Paris, le départ d'UGC est un signe "terrible" car il remet en cause l'équilibre de cette avenue historique qui mélange boutiques de luxe, commerces populaires et loisirs. "Il y a 7 cinémas (40 écrans) sur les Champs, raconte Lyne Cohen-Solal (PS), adjointe au maire en charge du commerce, contre 13 en 1985. En deçà, le quartier risque de ne plus être attractif et de se banaliser."
"Si les cinémas ferment, c'est une clientèle en moins", explique Patrice Josien, gérant du café Le Deauville. Car les restaurants sont également à la peine. Chez le glacier Häagen-Dazs, le loyer représente 20 % du chiffre d'affaires. Le Flora Danica ne peut survivre que grâce au soutien de l'Etat danois, son propriétaire, "avec l'obligation de servir de la cuisine danoise", remarque Philippe Amzalak, le gérant. Il en est de même pour la Maison d'Alsace, financée par le conseil général.
Au numéro 100, dans un immeuble appartenant à l'assureur Generali, Esprit vient de signer un bail et va prendre la place du restaurant Les Cascades. La marque de vêtements va débourser 9 100 euros le m2.
La Ville de Paris accuse les grandes enseignes de vêtements comme H & M, Zara, Gap, Célio... de gonfler de manière démesurée les prix des loyers. Ces marques se payent une vitrine pour asseoir leur notoriété. "A Paris, comme ailleurs, Zara recherche les meilleurs sites commerciaux, se défend la direction d'Inditex, propriétaire de Zara. On ne peut pas rendre responsables les entreprises, qui produisent richesses et emplois, du prix des immeubles."
Selon l'étude du cabinet de conseil Clipperton, commandée par la Ville de Paris, sur les 332 magasins de l'avenue, 39 % sont dévolus au textile. "C'est un maximum, souligne Mme Cohen-Solal. Au-delà, il n'y a plus de diversité commerciale."
C'est pourquoi la commission départementale d'équipement commercial (CDEC) a refusé à H & M, le 12 décembre, l'autorisation de s'installer au numéro 88. Pourtant, l'enseigne suédoise a versé 20 millions d'euros pour le droit au bail à la SFL, propriétaire. Elle peut faire appel auprès de la commission nationale. Comme l'a fait Adidas, qui a finalement pu s'installer sur les Champs.
Le niveau atteint par ces loyers exaspère Jean-Noël Reinhardt, président de Virgin Megastore. Il menace : "Si l'augmentation des loyers perdure, un jour nous envisagerons de partir." Selon nos informations, en dix-huit ans de présence, le poids du loyer du Megastore, a doublé. Il est passé de 4 % à 8 % du chiffre d'affaires (80 millions d'euros en 2005). "Nous ne devons pas laisser le marché s'autoréguler. Les politiques doivent intervenir", réclame M. Reinhardt. "
C) Le Monde 23/12/06 : Mustapha Kessous et Isabelle Rey-Lefebvre
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